A l'écoute du gagnant de la Palme d'Or en mai dernier, j'ai trouvé cela plutôt chouette que Sean Baker la reçoive. Encore que, dans un geste purement romantique, il aurait été merveilleux que Coppola en récolte une troisième pour encourager sa recherche perpétuelle et peut-être aussi son manque de lucidité. Avec une troisième il serait passé devant les Dardenne, Östlund, August. Et il le méritait. Au moins jusqu'Apocalypse. Après c'est une autre histoire, celle du vin et de Sofia, puis de son neveu. Mais revenons à Sean et à cette Palme. Une Palme qui me paraît méritée, pour l'ensemble de sa carrière et de son point de vue d'artiste, mais trop tardive car Anora est vraisemblablement son film le moins incarné, le moins personnel. Dans ce long-métrage on navigue entre du James Gray, du frère Coen( je l'ai mis exprès au singulier), et du Kiarostami. Mikey Madison y est ébouriffante et toute la direction d'acteur de Baker fait encore des prouesses mais la Palme aurait dû aller ailleurs. Chez moi probablement. Ou pour The Substance. Qui ne montre rien d'autre que de l'audace et c'est déjà très bien. En remettant la Palme à Sean Baker, Greta Gerwig semble lui avoir rendu la pareille, de la lui offrir pour le féliciter pour son travail antétieur. Anora est un film maîtrisé, cohérent, mais qui ne fait que répéter que ce que l'on avait déjà aperçu dans Red Rocket, Florida Project, Tangerine. En moins viscérale. En moins percutant. Mais avec toujours beaucoup d'amour.
Anora ne méritait pas la récompense suprême, pas plus qu'Emilia Perez, parce que personne ne mérite un prix plutôt que quelqu'un d'autre. Les œuvres d'art ne doivent pas s'affronter, mais s'accompagner, se compléter ou refléter.