LA VÉRITABLE HISTOIRE DE LA PEACH
La Peach est la petite sœur de la Travolta. Elle est née après, avec la volonté de vous offrir un talon avec moins de hauteur et plus de surface de pose. La Peach culmine à une hauteur raisonnable de 7 centimètres. Là où les choses sérieuses et agréables commencent.
Si la Travolta fut inspirée par John dans Grease, John dans la Fièvre du Samedi Soir, John dans Volte Face, quid de la Peach ? Car, in fine, c'est bien tout ce qui nous intéresse.
La Peach est née un jour où je me rendais au cinéma pour voir un double programme dans les alentours de Pigalle. Des films avec Sonny Chiba. Le héros que mon père surkiffait et dont il regardait tous les films en VHS pour s'inspirer de ses techniques de combat.
Parfois, je lui servais de punching-ball afin qu'il parfasse son game et grâce à ma patience il put progresser et gagner quelques tournois en province. Cette enfance à la dure me permit tout de même de savoir me défendre dans la cour de récré. Il faut dire qu'au collège, étant donné que j'avais grandi plus vite que les autres, j'étais une sorte de phénomène. Ce statut spécial donnait envie aux autres d'en découdre avec moi. Mais grâce à mes parades, mon art de la balayette et du plaquage au sol, j'étais devenue une terreur alors que je rêvais secrètement de les câliner. Ce que je faisais d'une certaine manière car au lieu de passer par la case infirmerie, je les pansais moi-même ou leur refixais leur scalp avec une aiguille à couture et les fils de mon jean.
Bref, ce jour-là, j'avais envie de revoir le héros de mon enfance. J'avais mis ma grosse veste en fausse fourrure léopard, car il faisait un froid fou, que je ne quittai pas une fois assise dans une salle incroyablement vide. Seul devant moi se tenait un type avec une belle petite mèche et une veste de costume en cuir qui rigolait fort à chaque fois qu'un personnage parlait ou se prenait un coup de latte dans la gueule.
Au début ça m'agaçait mais j'ai vite compris qu'il faisait ça de bon cœur et au bout d'un moment j'ai trouvé cela très communicatif alors je me suis rapprochée de lui pour lui proposer de partager ma grande bassine de bonbons Haribo. En échange, il m'offrit des clopes que nous avons allumées en rafale.

C'était sympa de voir un film de kung-fu comme s'il s'agissait d'une comédie de Claude Zidi. Je n'y avais jamais songé avant cela.
Lorsque le second film prit fin, je proposai au petit gars d'aller boire une pinte, ou deux. Il accepta. Le petit gars était vendeur de disques Porte des Lilas. Il y gagnait mal sa vie mais il adorait son métier et son patron qui lui laissait les coudées franches et la jouissance de la réserve à l'étage dont il avait aménagé une partie avec un lit de camp pour y dormir. Il s'appelait Lolo mais tout le monde le surnommait the Lol car il passait son temps à se marrer. Je ne pouvais que leur donner raison.
Il me proposa d'aller manger un longburger chez FreeTime et d'aller écouter des vinyles dans sa boutique. Je n'avais rien d'autre de mieux à faire et même si cela ressemblait à un traquenard maquillé, je préférais toujours ça qu'à m'endormir comme une loque avec un pétard devant une émission de TF1.

Après m'avoir fait écouter les derniers achats de la boutique, il m'invita sur le toit terrasse de l'immeuble avec un pichet de vin chaud. C'était immonde mais ça réchauffait en ces temps glacials.
Surtout, cela me donna envie de me rapprocher du Lol et de l'embrasser pour sentir sa grosse langue côtelée de papilles. On a dû faire tourner nos appendices respectifs un bon millier de fois dans la bouche l'un de l'autre. Suffisamment pour que le petit matin pointe le bout de son nez. À partir de ce moment-là, il décréta que j'avais un goût de pêche. Il me surnomma Peach.
Après ce premier rencard, nous ne nous sommes plus jamais quittés.
Il demanda à son patron de m'engager. Ce qu'il fit par amitié. Problème, le commerce ne générait pas assez pour me filer le moindre rond. Du coup je me rétribuais en sortant des albums rares que j'allais revendre deux ou trois fois leur valeur à la sortie des écoles de bourge. Grâce à cela je pouvais me payer des Marlboro et de grandes bouteilles de Coca que je descendais à grande vitesse. Nous sommes restés 6 mois à vivre de vinyles et de bières fraîches tout en nous embrassant chaleureusement jusqu'à ce que l'apnée nous sépare.
LORSQUE NOUS N'ÉTIONS PAS À LA BOUTIQUE, NOUS PASSIONS NOTRE TEMPS DANS LES CINÉMAS DE QUARTIER À LA RECHERCHE DE RARETÉS SIGLÉES SONNY CHIBA AVANT DE NOUS METTRE D'ACCORD QUE NOTRE VIE N'ÉTAIT PAS À NOUS AIMER DANS UN SI PETIT ESPACE. ET THE LOL VOULAIT VOIR UN FILM DU GRAND CHAMPION SUR PLACE.
ALORS NOUS AVONS RACLÉ LES FONDS DE TIROIR À LA RECHERCHE DU MOINDRE YEN QUI NOUS AMÈNERAIT VERS TOKYO ET GRÂCE À NOS EFFORTS COUPLÉS, PLUS MES VENTES D'ALBUMS TOMBÉS DU CAMION, NOUS AVONS RÉUNI LA SOMME NÉCESSAIRE POUR NOUS ENVOLER ET PARTIR À L'EST.
Notre premier arrêt fut une usine à mochis dans les périphéries de la capitale. À la recherche d'un endroit pour passer la nuit après s'être égarés, nous nous faufilâmes dans l'usine, pensant qu'elle était abandonnée. À la lumière de la lune, parmi les machines silencieuses et les piles de mochi doux, notre amitié prit une tournure inattendue. Le cadre insolite, combiné à l'adrénaline de nos aventures, nous rapprocha d'une manière revigorante.
Ce soir-là, nous partageâmes un moment d'intimité, enveloppés dans l'arôme sucré du mochi, une expérience qui nous unirait à jamais.
Le lendemain, nous avons repris notre quête pour trouver Sonny Chiba. Cependant, le destin avait d'autres plans farfelus pour nous. En se baladant dans les rues animées de Tokyo, nous tombâmes sur un concours de cosplay improvisé, organisé par un groupe local de fans de cinéma. Poussés par l'excitation nous décidâmes de participer, improvisant des costumes avec ce que nous avions sous la main. Je me transformai en une version extravagante de Princess Leia avec des accessoires en uranium, tandis que The Lol se déguisa en un Inspecteur Clouzot japonais, armé de baguettes et de disques de mochi en guise d'étoiles de ninja.
