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DES NOMS QUI ONT UNE FAMILLE
Comme la plupart de mes confrères désireux d'avoir un minimum de conscience professionnelle, je me dois de vous poser cette question. Comment vous viennent à l'esprit les noms si merveilleux que vous donnez à vos chaussures ?
En fait il s'agit d'une relation très intellectuelle et en même temps charnelle que j'entretiens avec mes créations.
Vous pourriez m'en dire plus peut-être ?
Non.Alors je vais poser ma question différemment, vous pensez d'abord au modèle ou à son nom ? L'oeuf ou la poule ?
C'est une question très "oeuf à la coq" si vous me permettez, comme l'aurait dit mon ami Jean Schulteis. Je pense bien entendu et en premier lieu à mon modèle. Celui qui va me plaire et qui forcément, plaira.Quelles sont vos sources d'inspiration ?
Ma source est naturelle et vive. Elle prend racine dans la culture pop mais aussi dans l'Antiquité ou la Renaissance.Vous servez-vous de boisson ou de drogues pour votre création ?
Ecoutez si je vois passer un truc, je ne fais pas la fine bouche mais en règle général et quasi-systématique, je suis la personne la plus saine au monde. Je cours, je marche, en arrière, je fais du yoga, de la samba, du cha-cha-cha. En fait tout ce qui permet à l'esprit de s'élever et à garder une ligne claire et limpide. Une ligne parfaite.
En fait lorsque je vais sur votre site, j'ai presque autant envie d'acheter vos chaussures que leurs noms, c'est tout à fait enivrant.
Vous tournez beaucoup autour des question de l'alcool. Vous aimez donc cela ?Bien entendu, je suis journaliste. Mais pour en revenir au noms de vos souliers ?
Vous avez tout à fait raison. Eh bien écoutez, en fait cela me vient après une bonne séance de spiritisme. Je m'entretiens avec des gens du futur qui me proposent des noms. Après je trie. J'ai dû proposer plus de 200 noms depuis la création de la marque.En fait ce qu'il y a de génial c'est que vous ne prenez pas vos clientes pour des idiotes. Vous n'allez pas appeler un modèle Marilyn ou Mick. Et c'est tout à votre honneur si vous allez chercher un peu plus loin dans la culture.
C'est ce qui me vient tout naturellement. Je vais appeler un modèle Fritzlang parce que je suis fan du réalisateur. Dumaurier parce que j'aime l'écrivain. Garcimoore parce que j'aime Garcimore et Michael Moore. Pareil pour Murnau, Rivette, Rohmer. Tous ces génies, il faut leur donner de la lumière constamment. Et puis parfois s'offrir quelques transgressions, jouer avec les filles, leur proposer des alternatives aux bêtises ambiantes. Faut savoir être libre de dire, réfléchir, parler, ne pas se normer.Propos recueillis par Isabelle Badinter pour le magazine Podium©