
Quand mon père est arrivé en France, il ne comptait pas s'y arrêter définitivement. Il pensait que ce serait un stop. Une sorte de mise en bouche à la vie occidentale pour ensuite traverser l'Atlantique et s'installer à New-York.

Alors que mes parents étaient occupés à se déchirer sur la suite à donner à leur vie, je pris à dix-huit ans, les choses en main et je décidai de parfaire mon anglais en partant un trimestre en Californie avec l'argent que j'avais gagné en vendant des fromages sur le marché du Boulevard Richard Lenoir, près de Bastille.

On me demande souvent d'où vient ce nom merveilleux que j'ai attribué un jour, à l'une de mes plus belles créations, la bien nommée Captain Love.

C’est donc reparti pour ce fameux et indétrônable meilleur festival du monde qui malgré une très rude compétition, reste le plus brillant et le plus convoité d’entre tous. A chaque approche de son ouverture, chaque réalisateur, chaque producteur se dépêche et finit son film à la hâte dans l’espoir d’être sélectionné en officielle, en parallèle, ou au moins sur une plage de la Croisette.

Fervente admiratrice du Festival de Cannes où elle est invitée chaque année mais où elle ne se rend jamais, faute de temps, trop occupée à préparer vos petits souliers, Patricia est toujours dans un état de transe quand arrive enfin la plus belle manifestation au monde.

C'est la rentrée, bordel. Bordel parce que lorsqu'on doit se préparer à mettre les mains, les pieds, le cou, le corps tout en entier dans une nouvelle année, il faut être préparées ou au contraire complètement relâchées pour se dresser et affronter un adversaire qui peut paraître démesuré.

Quand j'étais jeune, très jeune, toute petite, à peine en âge de marcher, j'ai été fascinée par un truc télévisé de dingue.

Les articles sont comme les histoires d'amour, ils finissent bien en général.

Le jour où j'ai quitté chez moi, parce que ça chauffait de dingue avec mon mec, mon mari, je suis partie à la recherche de moi-même. Je lui ai laissé le petit, et je suis partie direction la Californie avec une idée en tête, retrouver celui dont j'étais tombée follement amoureuse, celui qui m'avait fait découvrir la fièvre au corps, le grimpage au rideau, l'ascension du septième ciel.

Seule au milieu du parking, dans la corvette blanche, intérieur cuir rouge, de mon futur-feu-époux, j'appelais à l'aide pour qu'une âme charitable vienne lui administrer les premiers secours. J'entendais encore un vague râle émanant de sa bouche. Voyant que personne n'arrivait, je me mis à lui pratiquer un bouche à bouche improvisé sur ses lèvres gercées.

Mon nouveau taf de croque-vie, préparer les morts de façon pop et scintillante, marchait du feu de dieu. Les familles des défunts me commandaient les personnages dans lesquels ils voulaient voir une dernière fois leur être aimé. J'eus le droit de préparer les gens en Michael Jackson, Kurt Cobain, Homer Simpson ou simplement en anonyme, en majorette, en joueur de football.

Sortie saine et sauve de mon gardiennage au Parker, la canicule retombée, mon premier réflexe fut d'aller me jeter un drink derrière la cravate.